Cela fait un peu plus d'une semaine que nous sommes dans ce magnifique pays qu'est le Kirghizistan et nous sommes déjà totalement conquis - le mot est faible - par nos deux premières aventures qu'ont été le trek à cheval à Song Kol et le trek de Kol Suu. On a la sensation qu'on est déjà comblé par ce voyage. Et il nous reste encore plein de choses à voir et à faire, alors c'est parti, direction Karakol, à l'est du pays, aux alentours du géant Issyk Kul.
Le programme de Karakol :
Un trajet en Marshrutka
Aujourd'hui, nous allons expérimenter un autre aspect de la vie kirghize, un trajet en marshrutka, mаршрутка en russe. Ce sont des sortes de mini-van, super utilisés ici, qui relient en général deux villes importantes. Les marshrutkas ont la particularité de ne partir que quand elles sont pleines - cela peut prendre 15 minutes comme plusieurs heures - et de faire des arrêts plus ou moins à la demande. Pour notre part, nous allons faire un trajet complet, depuis Naryn jusqu'à Karakol. Six heures de route pour la modique somme de 600 som - som som som - ainsi que 50 som pour les sacs, soit environ 6,50€.
Nous nous levons très tôt ce matin-là et heureusement que nous ne sommes pas arrivés plus tard car la première marshrutka s'est remplie en un clin d'oeil et elle est déjà partie, quant à la nôtre, elle comprend déjà quelques passagers. Vite, vite, vite. Dedans, 15 Kirghizes, et nous 4. Beaucoup nous sourient, d'autres nous observent du coin de l'oeil. Léa trie les photos de son appareil tandis que Ronny continue de tricoter l'écharpe qu'il a commencée. Geoofi m'a laissée la place côté fenêtre car il sait à quel point j'aime regarder le paysage défiler. Je lance ma musique et c'est parti pour un petite introspection... Et beh non ! Notre voisin de siège, un certain Erkin, commence à nous parler. Ha vous n'avez pas fini d'entendre parler de cet homme, c'est sans aucun doute notre plus belle rencontre au Kirghizistan. Cet homme est un vrai bout en train, un clown, mais il est surtout très intéressant. Il a eu 1000 vies et il a d'ailleurs appris l'anglais au bureau de l'ONU car il a fait plusieurs missions pour eux. Il a notamment été chauffeur pour aller récupérer les victimes lors de la guerre entre le Tadjikistan et l'Afghanistan, et il a aidé à donner les repas aux réfugiés... Dans un tout autre registre, il a animé une chaîne de radio kirghize pendant des années. Son rôle ? Répondre aux appels et faire des blagues. Il devait être génial dans ce rôle. Et maintenant il est coach de vie pour les particuliers. On est curieux de connaître son parcours et il n'est pas avare en histoires. Nous voilà donc en train de papoter, et papoter, et papoter. Puis les dames de derrière s'en mêlent et aident Ronny (= font à sa place) à faire son écharpe. Il y a une super convivialité.
Le lac Issyk Kul et Erkin
C'est vraiment génial cette ambiance. Les enfants avec nous ne bronchent pas, pas un pleur, pas un cri, tout le monde est si serein, c'est tellement agréable. Avec Erkin, on a l'impression de faire partie de ce monde, il n'arrête pas de nous faire rire. Je lui dis que j'adore les animaux et que je rêverais de voir une panthère des neige alors il appelle son amie Dame la panthère des neiges et lui demande de venir nous voir pendant notre prochain trek à Ala Kol. Puisse-t-il la convaincre. Le temps file tant et si bien qu'il décide de nous inviter chez un ami à lui qui a un verger d'abricotiers sur la plage d'Issyk Kul, juste à côté de Bokonbayevo. Et quelle invitation ! Il nous promet un grand feu sur la plage, des chansons, un bon repas. Comment dire non ? On ne sait pas encore quand est-ce qu'on va y aller, mais on va y aller. À la pause déjeuner, c'est tout naturellement qu'on mange avec lui, il discute un peu plus avec Léa et Ronny et le courant passe super bien. Voilà comment plus de la moitié du trajet est passée en un claquement de doigt. Geoof se plaint d'avoir mal au dos et Erkin entreprend de lui masser la nuque en plein milieu du bus et le bougre sait s'y prendre, il lui promet un massage intégral si nous venons le visiter dans son verger. Les paysages défilent et c'est très beau partout, on sait déjà qu'on reviendra dans ce pays.
Quelque temps après le départ d'Erkin sont montés une mère et ses 3 enfants, plus ou moins entassés entre le siège d'Erkin et le couloir central. Les petits se suivent en âge : deux, trois et quatre ans, tous avec un T-shirt jaune et une bouille d'amour. Les deux plus grands commencent à avoir le mal des transports et la maman gère comme une chef mais ça se voit qu'elle a peur de réveiller la petite dernière endormie dans ses bras. Je lui fais signe de prendre ma place mais au lieu de cela elle me donne sa petite. Et voilà que je suis en train de veiller sur ce petit ange - mais lourd haha - dans mes bras. Je trouve là encore, dans ce geste, cette confiance en les autres et en la vie qui m'émeut vraiment.
Arrivés à Karakol, on s'en va trouver notre hostel et notre yourte, magnifique mais avec une odeur de toilettes publiques pas très agréable. Qu'importe. Petite machine à la main, courses pour le trek, micro sieste, puis nous voilà en route pour aider Anaïs (avec qui on a partagé le trek à cheval à Song Kol) en pleine intoxication alimentaire, la pauvre. Après lui avoir retiré des sous, mené de l'eau et pris quelques nouvelles, on file vers le Duet Restaurant où nous mangeons notre premier repas occidental, un bon burger veggie, miam miam. Et puis qui rejoignons-nous ensuite, pardi ? Le petit Chris la fripouille au bar The Hut qui deviendra bientôt notre bar préféré. On rencontre ses nouveaux copains de voyage, eux aussi commencent le trek Ala Kol demain matin. On ne rentre pas trop tard car ça va être costaud les amis.
Trois jours de trek Ala Kol
S'ensuite le trek de trois jours qui passe par le reculé et magnifique lac Ala Kol. Un trek intense, mais totalement inoubliable. On a marché dans des paysages grandioses, dans de larges vallées de beaux sapins traversées par des rivières au bleu laiteux, on a longé ce lac Ala Kol juste sublime, avec ses hauts sommets, on a vu des chevaux sauvages, on s'est baigné dans des sources d'eau chaude... Bref, c'était juste génial. Retrouvez l'intégralité de l'aventure dans l'article : Le trek Ala Kol au Kirghizistan
L'incroyable lac Ala Kol
Une vie d'expat à Karakol
Ce trek a laissé des séquelles, on est dans un sacré état de fatigue. Les pieds sont particulièrement touchés : j'ai une énooooorme ampoule sanglante au talon - beurk - et toute la pulpe des orteils est irritée. Mais ce n'est rien comparé à la toux de Léa qui est toujours bien malade... Bichette. On leur raconte la fin du trek, ils nous racontent leur retour galère avec une Léa à bout de force, et on est content de les retrouver.
Le programme des deux prochains jours va être simple : dormir, manger, et laver nos affaires, sans oublier les soirées endiablées au bar The Hut. Nous avons décidé de prendre une bonne chambre dans l'auberge Duet Hostel, cet endroit est très agréable avec sa partie restaurant et son énorme cour intérieure. On se sent super bien ici. En plus il est juste à côté de The Hut. Une autre mission particulière nous attend : Rony a cassé son téléphone et veut en acheter un nouveau. De négociation en négociation, de magasin en magasin, nous finissons par tomber sur un vendeur qui accepte de lui vendre son iPhone 15 personnel, c'est pour le moins cocasse. La transaction est ainsi faite à un prix vraiment intéressant, tout en liquide. Ronny a les poches pleines de biftons haha. Nous flânons ensuite dans les rues et on visite le bazar de Karakol, où on peut trouver des vêtements puis, sur le stand suivant, tout l'attirail pour s'occuper du jardin, puis des beignets à la pomme de terre, puis un étal de 10 mètres recouvert des fameux pains ronds kirghizes, puis tous les outils pour faire des tapis en feutre, leur spécialité, puis... Ça ressemble au souk de Marrakech mais dans un calme magnifique. Aucun vendeur ne nous alpague, voire ne nous regarde, c'est super agréable. Bref, nous passons du bon temps. Nous nous arrêtons aussi un moment pour visiter l’église orthodoxe tout en bois, qui a son charme, bien que nous ne soyons pas trop fans d'architecture et encore moins de bâtiments religieux.
Mais nos moments préférés ici à Karakol restent quand même les soirées endiablées dans notre QG officiel, au bar The Hut. Là, se mêlent des parties de baby-foot, de Durak et de fléchettes, le tout accompagné de nos amis venus des quatre coins du monde. On rigole beaucoup et on fait pas mal les cons mais on a aussi des discussions passionnantes sur l'alpinisme, sur la politique de leur pays, sur la vie en général. La vie de rêve, quoi ! Mais bon, pas le temps de niaiser, surtout en voyage ! Nous reprenons rapidement du service et nos activités.
Une soirée au bar The Hut, notre QG à Karakol
Jeti Oguz
Cette vallée, à moins d'une heure de Karakol, est non seulement une réserve naturelle abritant de nombreux animaux, mais elle ressemble aussi à une sorte de décor de western, en pleine Asie centrale. Le dépaysement est total, on se croirait dans un parc américain. Des canyons de roche couleur ocre vous encerclent de part et d'autre. On appelle d’ailleurs celui-ci la "vallée des 7 taureaux", car selon l’angle, on peut y voir sept têtes de taureaux... Je vous laisse chercher !
La légende de Jeti Oguz
L'endroit est facilement accessible et très touristique, c'est le revers de la médaille : il y a beaucoup de monde. Nous faisons rapidement un tour aux points de vue sur la colline, où nous faisons de gros câlins aux ânes curieux qui viennent nous dire bonjour. Puis, dans un souci de solitude, nous décidons de nous enfoncer à l'intérieur du canyon. La descente est folklorique, surtout pour Nounette en tongs qui souffre toujours de ses pieds et qui glisse toutes les cinq minutes. Mais une fois arrivés en bas, c'est vraiment sublime : nous sommes seuls au monde, entourés d’immenses falaises rouges avec de nombreux rapaces qui planent en cercle au-dessus de nos têtes.
Pour le canyon, une ou deux heures suffisent largement. Cependant, si vous souhaitez suivre la rivière et vous enfoncer plus profondément dans la vallée, prévoyez tout de même une journée entière. Il y a une cascade à voir et une super randonnée. Pour notre part, on a assez marché récemment haha nous rejoignons notre taxi et reprenons la route vers Karakol. Sur le chemin, de nombreuses démonstrations de chasse à l'aigle sont proposées, mais elles ressemblent beaucoup à des attrape-touristes, donc nous préférons ne pas nous arrêter.
Décor de Western à Jeti Oguz
Un après-midi à cheval sur les hauteurs Karakol
Comme l’expérience à cheval au lac Song-Kol nous avait vraiment plu et que Léa est malade depuis plusieurs jours, on veut lui faire plaisir en refaisant une journée à cheval car elle en parle depuis un moment. Nous signons donc pour une nouvelle excursion. Au lendemain, nous nous mettons donc en route pour un petit ranch dans les hauteurs de Karakol, apparemment la vue y est magnifique. Dès le départ, nous sentons que l’expérience sera différente : les selles sont rigides et nous font mal dès que nous nous asseyons, aucun casque ne nous est proposé, et bien que nos guides ne soient pas méchants, ils sont peu souriants et pas très bavards. En revanche, les chevaux sont, une fois de plus, magnifiques et très gentils.
Nous partons pour une boucle de cinq heures. Au début, la végétation est aride et ça grimpe pas mal. Notre jeune guide a un comportement étrange, il siffle fort en direction de la montagne et finalement, au bout d'un moment, un jeune homme sort des buissons, monté sur un âne, et échange discrètement quelque chose avec lui. Une transaction se passe. C’est assez drôle à observer, mais nous ne cherchons pas vraiment à comprendre même si nous avons reconnu ces petites boules noires déjà aperçues à Song Kol. On demandera à Erkin ce que ça peut être quand nous le verrons. Arrivés au sommet, la vue de l’autre côté est sublime, ils n'avaient pas menti : plusieurs vallées verdoyantes s’offrent à nous, s’étendant jusqu’aux glaciers au loin. De l’autre côté, nous avons une vue imprenable sur la ville de Karakol et sur le lac Issyk-Kul plus loin. Encore une fois, un panorama qui vaut vraiment le détour. Nous nous arrêtons ici pour casser la croûte.
Sur les hauteurs de Karakol
Comme à l’accoutumée, à peine avons-nous le temps de nous poser que le temps se gâte. L’orage tonne avec force, résonnant dans la vallée, le son est très fort et c’est assez impressionnant. Les nuages passent sur une montagne verdoyante en face de nous et, quelques minutes plus tard, elle est entièrement blanche, recouverte de neige, tandis que nous sommes encore sous un soleil de plomb. Un spectacle incroyable et magnifique à la fois. Nous redescendons dans la vallée et tombons sur une yourte où se trouve une femme seule, un genre de garde-chasse, nous explique-t-on. Elle est là pour surveiller la vallée, principalement contre les bêtes sauvages. Elle nous informe que le chemin que nous voulions emprunter est inondé. Enfin, c’est ce que nous dit notre guide, qui nous fait rebrousser chemin. Finalement ce ne sera pas une boucle, et ça ne sera pas 5h de cheval mais 3h. Nous ne sommes pas très contents, car nous avons du mal à le croire, nous avons surtout l’impression qu’il veut rentrer rapidement. C’est à ce moment que le cheval de Geoof se met à ruer toutes les cinq secondes et à démarrer en galop incontrôlé. Cela devient sportif de le maîtriser, et Geoof commence à avoir bien mal aux fesses à force de serrer les cuisses et de rebondir sur la selle. Je crois que le second guide a compris, en voyant nos visages, que nous sommes déçus de ne pas faire la boucle complète. Une discussion animée s'ensuit entre les deux guides. Finalement, le jeune partira seul devant - il avait sûrement quelque chose à récupérer - ce qui confirme nos soupçons concernant le changement d’itinéraire. Le second guide, quant à lui, nous emmène sur un autre chemin avec de superbes points de vue. Il fait de son mieux pour nous satisfaire et il est vraiment adorable. Le jeune finit par nous récupérer, arrivant en plein galop de nulle part. Finalement, le chemin de retour n’est pas trop mal, et nous en prenons encore plein les yeux.
Vous l’aurez compris, même s’il ne s’est rien passé de spécial et que nous avons apprécié notre journée, l’expérience était nettement moins enivrante que la première fois au lac Song Kol. De retour à Karakol, nous préparons nos sacs et filons au bar pour faire la fête, car c’est notre dernière soirée sur place. Demain, nous partons passer quelques jours chez Erkin à côté de Bokonbayevo !
From Karakol with love
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