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Dans la Puna... Il a mis du diesel à la place de l'essence !

Dernière mise à jour : 13 sept. 2020

C'est embêtant me direz-vous.


Mais d'abord, mettons-nous dans l'ambiance. Allez allez. Après l'incroyable Laguna Brava, en ligne de mire pour ces quelques jours à venir la Puna, désert d'altitude transnational qui caractérise l'écosystème de la cordillère des Andes entre 3200 et 3800 mètres d'altitude. En Argentine, cette zone de dépression atmosphérique est située dans le nord-ouest du pays, on y trouve de nombreux salares, des lacs, des volcans et des montagnes érodées par les vents violents et les importantes variations de température. Un autre monde. Chargés à bloc, nous sommes prêts à affronter le vent fort, le sable, la neige, le soleil brûlant, les longues heures de voiture et le mal aux fesses qui va avec, les nuits à -8°C, la poussière dans les oreilles, le nez, les yeux... Pourquoi ? Parce que les paysages de cette région promettent d'être grandioses. Extraordinaires. Notre point de départ pour cette épopée est Belén d'où nous nous enfonçons dans un vaste noman's land en direction du village El Peñon, première étape de ce trajet initialement prévu sur 4 jours. Je dis bien initialement car vous l'aurez compris cela ne va pas de passer comme prévu.


Route entre Belèn et El Peñon

Premier jour, première galère. Sympathique celle-là, on commence doucement.

Depuis El Peñon que nous avons gagné sans difficulté, nous roulons sur des pistes pas trop mauvaises pour nous rendre à El Campo de las Piedras Pomez, un champ de pierres ponces à perte de vue. Nous ne comprenons pas pourquoi ce ripio (route de terre) est classé comme mauvais. "Ils exagèrent ces Argentins quand même, ça passe tranquille..." Haha, mais que nous sommes présomptueux. À 15 petites minutes de l'arrivée nous voilà face à une rivière de sable. Imaginez une zone sableuse et glissante profonde de 60cm sur 20m de longueur. Une horreur ! Sans 4x4 c'est impossible. La première moto devant nous s'élance. RAS. La deuxième, RAS. La troisième... Ha, elle s'ensable. Ses copains viennent l'aider. La pression monte mais maintenant que nous sommes ici il faut bien se lancer hein. Et puis nous avons un 4x4. Allez. 3, 2, 1... Bloum bloum bloum. Et voilà, nous sommes bloqués au milieu et bien au milieu histoire de dire que la marche arrière s'avère tout aussi inutile que la marche avant. Geoffrey déblaie les roues, j'essaie de repartir et puis rien, il s'est juste pris une méga giclée de sable dans la tête peucheurette. Le vent souffle tellement, nous sommes fouettés par de petits graviers, c'est un enfer. On commence à paniquer. Une des motos décide de nous venir en aide. Muchas gracias! C'est un couple d'Argentins, Norma et Guillermo, mais ça nous l'apprendrons après. D'abord place à l'action ! Bim bam, ni une ni deux Guillermo nous aide à creuser et dégonfle les pneus de la voiture - règle n°1 - il sort les tapis de sol de la voiture et les met derrière les pneus - règle n°2 - il se met sur un autre mode du 4x4 : le 4L - règle n°3 - et passe la marche arrière - règle n°4 très importante : toujours faire marche arrière ! Maintenant il recule et... Bravo ! Il nous a sorti de la mierda. Bisous, câlins, sourires, tapes dans le dos. Tout y est. On les aime tellement. Mais le cours ne s'arrête pas là, il remonte dans la voiture, s'élance à toute vitesse et traverse. Il fait demi-tour et retraverse. Ok, c'est clair, c'est faisable. À ton tour me dit-il avec - règle n°5 et dernière règle - mucho velocidad. Il faut y aller à fond, sans penser. Je me mets au volant... Vroum, vroum, vroum, on fait chauffer le moteur, on prend de l'élan et on appuie à fond sur l'accélérateur. C'est fait ! Joie, bonheur, fierté, allégresse. Ils nous disent bon vent, filez, allez, vite, ne vous retournez pas. On aimerait leur refaire un câlin mais on n'ose pas ralentir... On roule à fond et enfin la récompense s'offre à nous, El Campo de las Piedras Pomez.


El Campo de las Piedras Pomez

Deuxième jour, deuxième galère. Beaucoup moins sympathique celle-ci.

L'aventure de la veille nous a redonné de la confiance : si on s'enlise à nouveau nous connaissons la méthode. Nous repartons à l'aventure gonflés à bloc, ou plutôt les pneus dégonflés à bloc, en direction de la deuxième étape : Antofagasta de la Sierra. La route, comme depuis le début, est incroyablement belle et dépaysante. Nous sommes sur une autre planète. On arrive dans cette toute petite ville et le programme est simple : banque, essence, achat d'une carte des routes, réservation d'une excursion au volcan Galàn pour le lendemain. Nous croisons en premier la station essence. On s'arrête. Comme d'habitude nous demandons de la Gasolina, la mejor (sous-entendu du Super 98). Le jeune nous fait répéter. Geoffrey précise No diesel... Et pourtant, putain de merde, il comprend gasoil qui signifie diesel qui signifie catastrophe. Nous demandons le plein, bien sûr... Et de nous remplir un des bidons de 20L, bien sûr... 1700$ pesos argentins. Tiens c'est bizarre l'essence n'est vraiment pas chère ici. Je tourne la clé et j'allume la voiture. Oui je vous entends d'ici crier : Mais nooon Manon ne fais pas ça, tu vas tuer ton moteur. Fort heureusement je traîne avant de repartir, j'ouvre Mapsme, je cherche l'emplacement de la banque, je blablate de je ne sais quoi avec Geoof... L'homme avec qui j'avais un peu parlé pendant que le jeune remplissait le réservoir, Ernest, s'approche à nouveau. Il nous demande quel est le combustible pour notre Fitz et on répond en coeur : gasolina. Il me demande d'arrêter le moteur. Nous avons déjà compris. Nous avons envie de pleurer. Il fait un contrôle et le verdict tombe, il a bel et bien mis du diesel à la place de l'essence. Heureusement il ne nous a pas écouté et n'a pas mis le plein, seulement un demi. Il va falloir vider le réservoir, intégralement. Ernest appelle le chef et deux énormes pick-ups rappliquent. Tout le monde se met en cercle autour de la voiture, chacun dit sa phrase. Et c'est parti. Un après-midi entier à attendre que ces hommes besognent et vident le gasoil. C'est fait. J'insère la clé, mets le contact et... Rien. Même pas une lumière sur le compteur. Aïe, comme un soufflé, notre espoir retrouvé s'effondre. Ils ne comprennent pas. Ernest qui a tout de même sauvé la peau de notre petit derrière pense que c'est un problème différent et indépendant, un problème électrique. Il recharge la voiture une première fois. Rien ne se passe. Ils recommencent pendant un très long moment et elle redémarre. Ouf. C'est la bonne nouvelle. La mauvaise c'est que nous devons arrêter notre périple ici et retourner à Belèn pour faire voir la voiture à un professionnel. Sauf qu'il est tard et que nous sommes lessivés de cette journée. Mais ces gens, fort sympathiques malgré tout, doivent eux aussi retourner à la ville et décident de nous escorter jusqu'à notre hôtel. On roule à fond, c'est le Paris-Dakar pendant 3h. Résultat final : un moteur sain et sauf, une batterie à changer et trois jours de perdu. Une bagatelle comparée à la pire des hypothèses : Geoof et moi en panne au milieu de nulle part, sans personne pour nous aider, avec des nuits négatives, que des nouilles à manger et un moteur mort. On s'en sort pas trop mal.


Entrée de Antofagasta de la Sierra

Et vous savez quoi ? Il y a du bon dans cette histoire. Déjà, nous avons appris que la gasolina se dit nafta en Argentine. Puis le garagiste de Tucuman qui s'est occupé de notre Fitz (oui de Tucuman et pas de Belen, il y a un anachronisme dans notre histoire mais c'est long et inintéressant à raconter) est un mec en or. Et sa femme, une femme en or. Nous avons même eu droit à une visite de la ville en leur compagnie. Encore autre chose, notre niveau d'espagnol a clairement augmenté. Et pendant ces deux jours nous avons vu milliers de belles choses. Et nous ne ferons peut être pas le circuit prévu mais nous pourrons quand même en faire un bout par un autre chemin. Alors rendez-vous à San Antonio de Los Cobres puis à Tolar Grande pour de nouvelles aventures. Hihaaaa !

Les protagonistes : Ernest de dos à gauche, Guillermo et Norma à droite

From la Puna with love.

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