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L'ascension du Huayna Potosi, l'expérience la plus incroyable de notre voyage

Dernière mise à jour : 25 mars 2022

Après la route de la mort à vélo et quelques jours à la Paz, nous allons vous conter ce qu'il n'est pas impossible de qualifier comme l'expérience la plus incroyable et la plus enrichissante de notre voyage... J'ai nommé l'ascension du Huayana Potosi qui signifie Jeune Tonnerre en Aymara. Ce sommet des Andes de 6088 mètres - houhou !! - se situe à environ 1h30 de La Paz. Ce n'est pas le plus facile des 6000 mètres que vous pouvez tenter en Bolivie, loin s'en faut, mais c'est sûrement le moins cher en raison de sa proximité avec la capitale.


Que la montagne est belle...

J'avoue que nous avons beaucoup d'appréhension à l'idée de faire cette ascension. Les quelques voyageurs que nous avons rencontrés nous ont tous décrit une expérience douloureuse parsemée de maux de tête, fatigue extrême, nausées, vomis voir de petits délires à la cumbre - au sommet. Ça ne fait pas rêver et en écumant les blogs nous nous rendons compte que de nombreuses personnes échouent, n'atteignent pas le sommet, les chiffres parlent de moins de la moitié des groupes. Mais on ne se décourage pas.


Première étape : trouver la bonne agence. Beaucoup de guides peu scrupuleux sont soit incompétents en haute montagne, soit pratiquent des prix très élevés. Victor qui souhaite refaire l'ascension en notre compagnie nous parle d'une agence... Tant mieux c'est la même que celle que nous avaient conseillée nos amis Jeanne et Mathieu. On contacte donc Juan le boss qui nous fait le topo et nous dit que c'est le meilleur - et ce n'est pas usurpé - qu'avec lui 90% des gens réussissent. Youpi, on va devenir des Mike Horn ! Il y aura un guide pour deux personnes, des cordées de 3 donc, le courant passe bien avec l'équipe de montagnards. On arrive à convaincre Emma de venir avec nous, et oui encore elle mais pas Adrien et Leslie qui ne désirent pas tenter le diable. Alizée leur amie se joint à nous pour la folle aventure. L'ascension est censée se dérouler en 3 jours. Le premier jour on arrivera au premier camp de base à 4500 mètres où on on s'exercera au piolet sur un mur de glace, le deuxième jour nous nous rendrons jusqu'au second camp de base à 5200 mètres qui nous servira de zone de repos avant le départ à minuit pour le sommet à 6088 mètres, une montée de nuit afin d'éviter les risques d'avalanche, la neige étant plus solide dans le noir froid. Après quinze minutes au sommet nous entamerons la redescente jusqu'au premier camp à 4500 mètres... Le programme nous convient, on est excité comme des puces. Feu !!


Nous arrivons au camp de base et découvrons le reste de la compagnie : un anglais nommé Keith d'une cinquantaine d'années, nous 5 et Mélodie, une Française de notre âge fort sympathique. Pauvre Keith entouré de Frenchies. Et bien sûr nos trois guides, Juan le boss, son second Javier et Mario le doyen qui finira par être mon préféré. Il fait froid, on s'équipe avec nos propres vestes pour ne pas tremper les grosses doudounes fournies par l'agence qui seront très utiles le dernier jour. On prend nos crampons, notre piolet, notre baudrier et c'est parti ! Après une heure de marche sous la neige - merci la pachamama - nous arrivons à un glacier, les paysages sont superbes, mélange de glace, de neige et de roche qui forment de magnifiques sculptures. Le soleil nous fait le plaisir de pointer le bout de son nez quand nous arrivons au pied du mur de glace d'environ trente mètres. Nous allons devoir le monter chacun notre tour. Javier ouvre la voie et Mario nous assure, le mec a quand même plus de soixante ans et il est en survet'/casquette là où nous avons tous deux pantalons, bonnet, écharpe et gants. Et ça le fait rire. Il ne fait que ça rire. On s'en sort tous plutôt bien et on adore ça, de la grimpe pure, dommage que ce soit si court.


Premier jour de la folle aventure, escalade sur glace

De retour au camp nous tombons sur le groupe précédent qui s'en revient de l'ascension et ils ont tous l'air abattus, vidés de toute forme d'énergie. On les questionne bien entendu et j'ai l'impression que le fait-même de nous répondre les épuise. Ils n'ont pas pu atteindre le sommet, ils ont dû rebrousser chemin et pour cause, une énorme tempête de neige les a pris de plein fouet la nuit dernière pendant la montée qui est devenue beaucoup trop risquée. Aucun groupe d'aucune agence ne s'y est risqué. Nous croisons les doigts et espérons ne pas subir le même sort. Un bon repas, une petite bière, beaucoup de thé à la coca - cela aide grandement à gérer le mal des montagnes - une partie de cartes et nous voilà tous au lit. On ne réagit pas tous de la même manière à la nuit à 4500 mètres, pour certains ça va bien, pour d'autres c'est un léger mal de tête ou des nausées mais pour Keith c'est la catastrophe ! Il est vidé de son énergie et ne veut pas aller plus loin. Il existe des pilules qui fluidifient le sang et peuvent aider à oxygéner le cerveau, c'est comme des Ibuprofene mais en mieux. Pas de miracle mais ça peut aider. On lui en donne une, il se repose un peu, mange et ça va mieux. Finalement il continue !


Le jour 2 est très éprouvant car vous devez charger tout votre matos dans votre sac il y en a pour quasiment 20 kg et ensuite monter au deuxième camp de base qui est à 5200 mètres, le tout sur des escarpements rocheux souvent instables et recouverts de glace : une vraie partie de plaisir ! On remplit tous nos gourdes d'eau chaude, on les bourre de feuilles de coca et c'est parti. On arrive enfin au camp vers 15h non sans mal. De là-haut la vue est spectaculaire, à couper le souffle que d'ailleurs nous avons du mal à trouver. Le camp se niche au pied du glacier nous avons un très léger aperçu de ce qui nous attend. Juan nous dit qu'il pense qu'il va faire beau cette nuit mais que l'ascension sera extrêmement dure car il a beaucoup neigé la vieille. Nous allons devoir évoluer dans au moins 30 cm de neige, chaque pas sera beaucoup plus éprouvant que d'ordinaire. Encore une bonne nouvelle, super !


À 17h00 nous mangeons, à 18h00 nous sommes au lit, à 23h30 le réveil sonne.



Vers l'infini et au-delà

La "nuit" a été catastrophique, j'ai très mal à la tête, je n'ai pas fermé l'oeil... Comme tout le monde d'ailleurs... Alizée vomit. C'est pas la grande joie, on s'équipe de trois pantalons, deux paires de gant, 2 paires de chaussette et de l'énorme veste fournie par l'agence ainsi que des chaussures de haute montagne qui pèsent un âne mort. Et bien sûr, pour parfaire notre attirail d'aventurier de l'extrême, on embarque crampon, piolet et casque. On se blinde de coca, de fruits secs et de barres énergétiques. Emma et Keith seront de la première cordée avec Super Mario, les plus lents au début c'est comme ça que ça fonctionne, Alizée et Mélodie au milieu avec Javier et Victor, Manon et moi en fermeture avec Juan. Nous sommes trois mais comme Victor l'a déjà fait et que pour le moment Manon et moi-même nous débrouillons plutôt bien, ça ne pose pas de problème. Je n'ai pas précisé que si un seul membre de la cordée se sent mal et souhaite abandonner c'est toute la cordée qui redescend. Il est 00h30, normalement la montée dure entre 5 et 6 heures, nous sommes censés arriver pour le lever du soleil... Alizée vomit. Nous partons.


Il est assez dur de se lancer, le tambour dans la tête est incessant et il n'est pas aisé de trouver son souffle mais nous avons de la chance, la pachamama nous sourit, il fait beau et la pleine lune nous illumine. Un spectacle ahurissant.


Nous avançons sous le regard bienveillant de la lune

Le rythme est trop lent pour nous, les guides nous obligent à nous arrêter souvent et on a du mal à garder une bonne cadence, ce qui nous fatigue plus qu'autre chose. Juan nous dit que c'est comme ça, on est un groupe et on va tous à la même vitesse. Doucement mais surement. On fait beaucoup de pauses, il ne cesse de nous dire que la communication est très importante... Alizée vomit. Mario rit. À chaque pause on s'hydrate, on mange un peu mais il fait très très très froid et le mal de tête est plus présent quand on n'est pas actif... Tant est si bien que plusieurs groupes nous doublent. Juan nous dit le sourire aux lèvres : “Ceux-là, ils n'iront pas en haut”. On a de la neige jusqu'aux genoux et malgré les crampons la progression est difficile.


En tout, il y a trois murs vraiment abruptes à franchir. Et de un ! On croise un groupe en train de redescendre. Et de deux ! Un groupe arrêté sur le coté abandonne la montée. Un autre groupe qui était derrière nous, n'arrivera aussi jamais au sommet. Finalement, arrivés au pied de la dernière difficulté, je zieute ma montre et on est à 5900 mètres, quasiment au sommet. C'est un mur quasiment vertical qui se dresse devant nous. C'est terriblement décourageant ! Nous devons nous arrêter car il y a trop de neige, apparemment on ne pourra pas monter nous annonce Mario en éclatant de rire. Un de nos guides part en éclaireur...


Je fais un bref état des lieux : Alizée s'est endormie à 4 pattes la tête dans la neige, ouf elle ne vomit plus, Mélodie est blanche et fatiguée, Emma a mal à la tête tout comme Victor et moi, Manon est épuisée et Keith est limite vert, on sent qu'il n'en peut plus mais il se force pour ne pas pénaliser sa cordée. Il fait affreusement froid, les doigts des mains et des pieds nous font terriblement souffrir, le jour se lève déjà. Finalement Mario annonce qu'ils ont trouvé une voie tout en rigolant à pleins poumons. On peut continuer ! Allez ! Va s'ensuivre l'heure la plus difficile de ma vie. Progresser ainsi en zigzag sur une pente qui ressemble plus à un précipice est carrément hard. En plus de la tonne d'émotions qu'implique le moment, vous êtes obligés de planter votre piolet à chaque pas pour éviter de tomber dans la pente et d'y entraîner votre cordée. On ne fait pas les malins. Manon s'effondre dans la neige pour se reposer et se fait sèchement réprimander par Juan qui lui dit que c'est très dangereux. Alors, une scène très cocasse se produit : elle le regarde les yeux emplis de supplication telle le chat potté dans Shrek et lui dit « Mais je suis fatiguée moi ». « La communication Manon, la communication » lui répond Juan. Sur le visage de mes compagnons se lit le désespoir et l'envie d'abandonner. Je n'ose même pas imaginer ce que devait laisser paraître le mien. Mais finalement nous continuons d'avancer, encore quelques mètres sur l'arrête et il est là, le sommet ! Je regarde ma montre, 6088 mètres. On y est bien. Nous avons mis 7h30, le soleil est déjà levé et c'est légèrement voilé mais qu'importe, nous y sommes. Les visages de chacun s'illuminent. Oubliée la fatigue, oubliées les ampoules, oublié le froid, oubliés les nausées et le mal de tête ; nous y sommes arrivés et tous ensemble !


6088 mètres d'altitude, S 16° 15.7021" - O 68° 9.1185"

Manon et Mélodie se mettent à pleurer de bonheur dans les bras l'une de l'autre, on est à bout de force, vidés de notre énergie mais quel bonheur, quelle fierté d'avoir réussi. On s'embrasse, on s'enlace et puis soudain les nuages s'écartent et le silence prend place. Quel paysage ! La vue est tout bonnement indescriptible, il vous faudra monter pour savoir héhé. On s'assoit, on contemple, c'est merveilleux. On se rend alors compte du gigantisme de notre univers ; surtout quand on voit le précipice derrière nous sur la face nord. Amis du vertige, abstenez-vous !! En le voyant on est soudain pris d'une envie de s'asseoir surtout avec le vent qui nous fouette. Une dernière photo de groupe, un petit pipi du sommet et il est déjà temps de repartir. Je me répète mais quel déferlement de fierté et de joie et quel bonheur de voir tous ces visages emplis de fierté et de gratitude.


Arrivés à la cumbre, si heureux et si fiers !

Nos trois cordées redescendent accompagnées de l'unique autre cordée à avoir réussi à monter. Honnêtement je ne pensais qu'on y arriverait tous ! La descente est beaucoup plus simple à part quelques chutes :) n'est-ce pas Victor ? On gambaderait presque. Arrivés au camp il est 10h, on se déchausse, on boit un thé de coca, on mange un bout, mais pas le temps de se reposer. C'est le moment critique pour le mal de tête. Il faut vite refaire nos sacs de 20 kg et redescendre au premier camp de base à 4500 mètres. Pour moi c'est la partie la plus dure du trek, vous êtes exténués, vous avez mal partout vous êtes en effort constant depuis minuit, vous avez un énorme sac sur le dos, vos jambes son faibles et tremblent, mon genou ne supporte plus mon poids et le sol rocailleux est super glissant. Et le pire, vous n'avez pas LA récompense à l'arrivée, aucun sommet ne vous attend, vous rentrez juste à la maison. Un véritable enfer. Mais nous y arrivons et en bas les rôles s'inversent, le nouveau groupe voit nos mines affables et commencent à nous questionner. Je dois avouer que non sans un certain plaisir et une note d'exagération je leur dis que c'est terriblement dur et qu'ils vont souffrir le martyr. Nous sourions tous en voyant leurs yeux s'écarquiller. Dans le bus de retour les langues se délient, Emma, Alizée et Keith nous disent avoir songé à rebrousser chemin plus d'une fois mais ne voulant pas être les premiers à abandonner, ni pénaliser le groupe, ils attendaient juste que quelqu'un le fasse avant eux. Finalement l'effet de groupe et la cohésion nous ont permis de tous monter. Une grande fierté.


La descente du sommet

> En route pour le lac Titicaca, notre dernier arrêt en terre bolivienne, déjà...



From the Huayna Potosi summit with love.


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